Directeurs de thèse : Taoufik Souami, Xavier Bonnaud
Le développement des énergies renouvelables dans les zones urbaines, suscite un intérêt grandissant, tant des professionnels que de la société civile, à partager localement l’énergie produite. Mettre en place un tel objectif relève régulièrement d’initiatives énergétiques locales.
Alors que le monde de l’énergie a précédemment cherché à se rendre invisible du monde urbain, le déploiement de telles initiatives énergétiques pose la question de l’accueil de ces projets par la fabrique urbaine. Nous postulons dans cette thèse que ces initiatives énergétiques locales contribuent, à leur manière, à faire réapparaître les systèmes énergétiques dans l’urbain, ainsi qu’à reconfigurer son organisation et son fonctionnement.
Le travail de recherche s’appuie sur quatre études de cas dans trois pays : l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni. Les cas choisis sont l’habitat participatif des Colibres à Forcalquier (France), la
Klimakommune de Saerbeck (Allemagne), le projet européen Sensible de stockage électrique à Nottingham (Royaume-Uni) et l’opération d’autoconsommation collective Smartmagne à Marmagne (France). Nous nous attachons à comprendre la fabrique de ces projets, c’est-à-dire que, au-delà de la matérialité produite, nous portons nos analyses sur les acteurs et sur les mécanismes de l’action en train de se faire.
Trois grands résultats sont avancés dans la thèse. Alors que le terme de ‘’communauté énergétique’’ est repris tant dans les travaux scientifiques que dans les communications nationales et européennes, nous montrons que l’utilisation du concept d’assemblage pour caractériser les initiatives énergétiques qui nous intéressent est plus pertinent. Notre objet d’étude correspond à l’articulation entre des acteurs (entreprises, chercheur.e.s, collectifs d’habitant.e.s, promoteurs, collectivité, groupes d’intérêts, etc.) et des objets techniques et matériels relevant d’un projet énergétique spécifique : les ‘’assemblages socioénergétiques locaux et urbains’’ (ASE-LU). Leurs liens ne sont pas basés sur des affinités sociales ou politiques, mais sont générés par la poursuite de la réalisation du projet même.
Les différents projets étudiés nous permettent de situer les effets produits au sein de ce que nous appelons la fabrique ordinaire de l’urbain. Autrement dit, les cas observés, dont l’objectif commun peut être exprimé comme la mutualisation d’énergie produite localement, ne relèvent que très peu de projet d’aménagement d’envergure (ZAC, OIN, écoquartier). Dans cette fabrique ordinaire, les porteurs de projets ne choisissent pas la confrontation socio-politique pour changer les règlements, les lois et les conditions de production. Ils préfèrent emprunter les marges et les failles laissées par la fabrique ordinaire, pour faire advenir leur projet et le transformer en réalité matérielle et sociale.
Enfin, nous discutons un possible rapprochement de nos études de cas avec les communs. Les ASE-LU débordent des découpages classiques (structurant pour la fabrique urbaine) entre droit de propriété et droit d’usage, entre privé et public, entre suprématie de l’intérêt général et poursuite des intérêts partiel ou individuels. Ils sont confrontés aux mêmes problématiques que les communs urbains et/ou énergétiques : blocages légaux, mobilisation de failles et d’interstices. Ils dessinent des organisations sociales et des ensembles spatio-techniques qui interrogent au moins les structures juridiques et sociales classiques, d’une part du monde de l’énergie, d’autre part, du monde de la fabrique urbaine.
Soutenance de thèse le vendredi 12 juin 2020
Année d’inscription : 2016
Ecole doctorale : Ville, Transports, Territoires (VTT)
Membres du jury :
Xavier Bonnaud, professeur d’architecture à l’école Nationale Supérieure d’Architecture de Paris-La-Villette et à l’école Polytechnique, co-directeur de thèse
Gilles Debizet, maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, rapporteur
Bernard Declève, professeur de l’Université Catholique de Louvain , rapporteur
Sinda Haouès-Jouve, maîtresse de Conférences, Université Toulouse Jean Jaurès, examinatrice
Sylvy Jaglin, professeure de l’Université Paris-Est, examinatrice
Fanny Lopez, maîtresse de Conférences, École d’architecture de la ville et des territoires Paris-Est, examinatrice
Florence Rudolf, professeure des Universités à l’Institut Nationale des Sciences Appliquées de Strasbourg, examinatrice
Jean Sonnet, directeur technique Omexom, VINCI Energies, invité
Taoufik Souami, professeur de l’Université Paris-Est, directeur de thèse