Paola Piras – Matérialité et gouvernance du système sociotechnique très haut débit à Dakar (Sénégal) : vision stratégique de l’infrastructure numérique, planification métropolitaine et chantiers de construction

Directrice de thèse : Sylvy Jaglin (Université Gustave Eiffel)

Photo de Paola Piras

Cette thèse analyse le développement d’un système sociotechnique très haut débit (réseau de fibre optique et data centers) et les transformations urbaines d’une métropole ouest-africaines en interrogeant les conditions et modalités d’une « urbanisme du numérique » à Dakar (Sénégal). L’ambition est de comprendre comment infrastructure numérique et espaces urbains se façonnent mutuellement et d’en proposer une lecture à partir de la matérialité plutôt que surplombant une matérialité-support inerte. S’appuyant sur des travaux issus des études urbaines et des approches sociales de la technique inspirées des Science and Technology Studies (STS), l’enquête porte sur les dimensions sociopolitiques, sociotechniques et territoriales du déploiement de l’infrastructure très haut débit qu’elle analyse à trois échelles, correspondant à des sphères d’action et des temporalités distinctes, et dans différents types d’espaces intra-urbains. Avec une méthodologique qualitative (entretiens, observation participante, cartographie), la thèse démontre les relations ambivalentes qu’entretiennent le développement privatisé du système sociotechnique très haut débit et les inégalités socio-spatiales. Aux échelles nationales et métropolitaines, elle met en évidence les liens entre les acteurs de l’urbanisme et de puissants opérateurs de télécommunication internationaux ainsi que leur influence respective dans l’aménagement numérique métropolitain dans un contexte marqué par des politiques néolibérales. A l’échelle de la rue, elle analyse le rôle des ingénieurs et techniciens réseaux en soulignant, à travers une étude des chantiers et du travail « en situation », le rôle des contingences matérielles, de l’informalité et du « bricolage » sociotechnique mais aussi celui d’une expertise technique « de la rue » essentielle dans le développement matériel de l’infrastructure très haut débit. L’analyse de la gouvernance du déploiement couplée à celle de la matérialité urbaine et des évolutions socio-spatiales métropolitaines a permis de qualifier un urbanisme numérique différencié selon les profils urbains. Cependant, tout en insistant sur le poids déterminant des opérateurs de télécommunication et l’insuffisante capacité de prescription et de régulation des pouvoirs publics, la thèse identifie des mécanismes d’autorégulation parfois bénéfiques à l’intérêt général et des mécanismes de rattrapage partiel dans certains quartiers moins « attractifs ». Ces résultats conduisent à nuancer les effets de la « privatisation » du développement du numérique sur la fragmentation urbaine et suggèrent des éléments de réflexion pour le réengagement public d’une pensée et d’une pratique de l’aménagement numérique urbain à Dakar.

Soutenance le vendredi 31 janvier 2025

Année d’inscription : 2019
École doctorale : VTT – Ville, Transports et Territoires

Composition du jury :

  • Olivier Coutard, Directeur de recherche, CNRS, Président du jury
  • Sylvy Jaglin, Professeure des universités, Université Gustave Eiffel, Directrice de thèse et Examinatrice
  • Fanny Lopez, Professeure des universités, ENSA Paris-Malaquais, Examinatrice et Rapporteuse
  • Armelle Choplin, Professeur des universités, Université de Genève, Examinatrice et Rapporteuse
  • Elisabeth Peyroux, Directrice de recherche, CNRS, Examinatrice
  • Momar Diongue, Maître de conférences, Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Examinateur

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