Isabel Soto Antunez : L’ingénieur concepteur et l’architecte, France, 1970-2000 : pratiques, réseaux, transferts dans le paysage de l’ingénierie

Directeurs de thèse :  Nathalie Roseau et Antoine Picon

L’objet de cette recherche porte sur l’étude et la compréhension d’une période de l’histoire de l’architecture et de la technologie qui a marqué la transformation du paysage de l’ingénierie française du tournant du XXIème siècle. Les années 1970-2000 ont été structurées par des ruptures et des réformes qui ont laissé une certaine empreinte sur les métiers de la construction d’aujourd’hui.
A l’échelle internationale, le rapport Meadows (1972) ou la recherche d’une économie des matériaux au travers du développement des structures légères sont l’amorce d’un complexe questionnement autour des modes de vie et de production. En France, le début des années 1970 correspond à la fin des Trente Glorieuses (1946-1975) et aussi à l’après 68.
Avant la fin de Trente Glorieuses, la construction architecturale en France était encore fortement influencé par la Reconstruction. Elle était caractérisée par les besoins d’après-guerre où l’industrialisation avait énormément marqué l’art de bâtir ainsi que par la tradition du béton armé dans la construction française. L’après 68 est un tournant dans la société française, entraînant une réflexion sur de nouveaux besoins et de nouvelles politiques constructives. Le mandat de Georges Pompidou (1969-1974) donne lieu à une recherche motivée par l’innovation en architecture et à l’apparition des grands concours internationales. En matière de formation d’architectes, l’après 68 représente une rupture avec la tradition de l’École des Beaux-Arts selon laquelle l’architecte devait s’occuper de l’art et l’ingénieur de la technique. Dans ce contexte, le rôle de l’ingénieur est incité à changer.
Ce qui semble avoir débuté avec un tournant socio-culturel et des ruptures politiques conduit, au cours de cette période, à la réalisation d’ouvrages aux grands défis techniques, contribuant ainsi à prendre une part prépondérante à l’élévation de la figure de l’ingénieur conseil français au premier rang de l’équipe de conception en architecture. Le Centre Pompidou, les serres et les toitures en toile tendue de la Villette, la pyramide du Louvre, ou encore le hall 2F de l’aérogare de Roissy à l’aéroport Charles de Gaulle dévoilent une incontestable importance accordée à la structure, qui devient même identitaire de son architecture.
Cette période laisse une trace matérielle qui se manifeste à travers différents projets : du langage technique développé dans ses constructions aux outils d’étude et de communication utilisés (tels que les logiciels de calcul, les maquettes ou les cahiers de dessins) entre autres. Mais cette empreinte est aussi immatérielle puisqu’il s’agit d’une véritable approche singulière du métier qui émerge à travers ces pratiques. Le corpus réuni couvre à la fois la conception des projets, le fonctionnement des agences, la trajectoire des maîtres d’œuvre, sous la forme d’archives et d’entretiens qui seront menés avec un ensemble de protagonistes de cette période. La thèse étudie la manière dont se sont réalisés ces projets et ces constructions, en quoi leurs raisons et leurs processus mettent à jour et transforment les manières de faire : réseaux, professions, pratiques.

The Engineer and the Architect, France, 1970-2000: Practices, Networks, Transfers in the Landscape of Engineering
PhD directors : Nathalie Roseau et Antoine Picon
The main focus of this research is to study and understand a period in the history of architecture and technology that marked the transformation of the French engineering landscape at the turn of the 21st century. The years 1970-2000 were characterized by disruptions and reforms that left a lasting impact on today’s construction professions.
On an international scale, the Meadows Report (1972) and the pursuit of a materials economy through the development of lightweight structures initiated a complex examination of lifestyles and production methods. In France, the early 1970s marked the end of the “Trente Glorieuses” (1946-1975) and the aftermath of May 1968.
Before the end of the “Trente Glorieuses,” architectural construction in France was still heavily influenced by post-war reconstruction. It was characterized by post-war needs where industrialization had significantly influenced the art of building, along with the tradition of reinforced concrete in French construction. The post-1968 era was a turning point in French society, leading to a reflection on new needs and construction policies. The mandate of Georges Pompidou (1969-1974) gave rise to a search for innovation in architecture and the emergence of major international competitions. In terms of architectural education, post-1968 represented a departure from the tradition of the École des Beaux-Arts, in which the architect was responsible for art and the engineer for technology. In this context, the role of the engineer was encouraged to change.
What appears to have begun with a socio-cultural shift and political disruptions led, during this period, to the realization of projects with significant technical challenges, thus contributing to the prominent role of the French consulting engineer in the forefront of architectural design teams. The Pompidou Center, the greenhouses and tensile roofs of La Villette, the Louvre Pyramid, and the Hall 2F at Roissy Airport in Charles de Gaulle Airport all reveal an undeniable emphasis on structure, which even became an identity of its architecture.
This period leaves a material trace manifested through various projects: from the technical language developed in its constructions to the study and communication tools used (such as calculation software, models, or sketchbooks), among others. But this imprint is also immaterial, as it represents a unique approach to the profession that emerges through these practices. The collected corpus covers both project design, agency operations, and the trajectory of master builders, in the form of archives and interviews that will be conducted with a set of key figures from this period. The thesis examines how these projects and constructions were realized and how their reasons and processes reveal and transform the manner of designing: networks, professions, practices.

 

Année d’inscription : 2023

Ecole doctorale : Ville, Transports et Territoires (VTT)

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