Directeurs de thèse : Olivier Coutard et Ludovic Halbert
Si en France, l’aménagement urbain d’après-guerre se caractérisait par un interventionnisme de l’Etat central au sein des marchés fonciers et immobiliers, la décentralisation s’est accompagnée d’un déclin de l’action foncière publique déployée par cet acteur. Depuis les années 2000, on observe cependant un regain d’ambition de la part des pouvoirs publics à intervenir sur les marchés fonciers, en réponse notamment aux difficultés croissantes d’accès au logement et aux problématiques d’artificialisation des sols observées en contexte métropolitain. Cette réaffirmation relative de l’action foncière publique en France, sous-tendue par l’essor de financements spécifiques et d’organisations dédiées tels que les établissements publics fonciers (EPF), apparaît contre-intuitive au regard des mutations que connaissent les systèmes de production des villes européennes : pressions budgétaires croissantes, rationalisation et privatisation du parc immobilier public, rôle prégnant des opérateurs privés dans les phases amont des projets d’aménagement, etc.
La thèse propose d’explorer cette tension apparente entre, d’une part, la place croissante et renouvelée des opérateurs privés dans la production des espaces urbains et, d’autre part, la reconstitution d’une capacité d’action foncière publique en amont de la conduite d’opérations urbaines et immobilières. En se concentrant sur les pratiques et les dispositifs déployés en Île-de-France depuis les années 2010, trois pistes d’analyses sont proposées. Premièrement, la thèse interroge la reconstitution progressive d’une capacité d’action foncière publique s’opérant sur le territoire francilien, à travers l’étude des mécanismes financiers, légaux, réglementaires, des instruments sociotechniques et des agencements organisationnels qui sous-tendent de tels dispositifs. Deuxièmement, elle examine les implications de cette action foncière renouvelée sur le système de production des espaces urbains et sur les relations entre les opérateurs privés de l’immobilier et les acteurs publics concourant à leur régulation. Enfin, elle explore les effets sociaux et spatiaux ambivalents de l’action foncière publique sur les opérations immobilières produites en Île-de-France, à travers une analyse des filières, c’est-à-dire des chaînes coordonnées d’acteurs, à laquelle cette action s’articule. Ce faisant, ce travail interroge la contribution potentielle des dispositifs d’action foncière publique aux dynamiques de tertiarisation et de financiarisation de la production urbaine francilienne.
Mots-clefs : Politique foncière, Maîtrise foncière, Action foncière, Circuits de financement, Economie politique urbaine, Technologies digitales
The reconfiguration of public land purchase practices in the Paris Region. Circuits of investment, digital technologies and connections with the urban development industry.
While urban development in France was underpinned by widespread state-led land purchase practices during the post-war era, the decentralisation process engaged in the 1980s has been accompanied by a decline of such practices. Since the 2000s, however, there has been a renewed ambition on the part of public authorities to exert a direct interference on land markets. Such an ambition has emerged in particular in response to the perceived exacerbation of both housing and environmental crises in metropolitan areas, and has been underpinned by the rise of dedicated tax-funded organisations such as the Établissements Public Fonciers (EPF). This re-emergence of public land purchase practices in France might appear counter-intuitive in view of the widely-documented changes taking place at the same time in the governance of European cities, such as an increase in budget pressures for public authorities, a wide-ranging rationalisation and privatisation of existing public land, and a growing role of private operators in urban development projects.
Année d’inscription : 2023
Ecole Doctorale : Ville, Transports et Territoires (VTT)