Directrice de la thèse : Elsa Vivant
Cette thèse en urbanisme prend pour objet d’enquête un instrument d’action publique incitatif de cession de fonciers publics et parapublics s’inscrivant comme le prolongement des démarches d’urbanisme négocié : les appels à projets urbains innovants (APUI). Ces consultations ont fait l’objet de nombreux débats dans les sphères académiques et professionnelles en urbanisme, certains y voyant une privatisation de l’aménagement, d’autres une bouffée d’air frais dans les pratiques professionnelles.
Cette thèse met en évidence comment, pour leurs initiateurs, les APUI opèrent comme des instruments de gouvernement à distance malgré un report de maitrise d’ouvrage vers les opérateurs immobiliers, l’« innovation » contribuant à enrôler les professionnels de l’urbain. Ils constituent une réponse adaptée aux contingences de leurs initiateurs : évolution des stratégies de légitimation des gouvernements locaux, diminution des marges de manœuvre financières des collectivités locales, développement de démarches par projets dans des contextes de gouvernances fragmentées. Ces consultations constituent une tentative de modernisation de l’action publique urbaine -et corrélativement des administrations. Elles réorientent temporairement les logiques d’action de plusieurs mondes professionnels dont les territoires d’activité sont en interaction.
Pour analyser le travail en train de se faire, notre cadre analytique emprunte à différents courants de la recherche en sociologie : de la justification, de la traduction, de l’action publique, des outils de gestion et de l’activité. À partir d’une enquête ethnographique, nous mettons en évidence les épreuves consécutives à l’industrialisation du « mode projet » et de l’« innovation » sur l’activité des élus, des agents publics locaux et des assistants à maitrise d’ouvrage depuis le lancement des consultations jusqu’à la mise au point des projets immobiliers lauréats : événementialisation et enrôlement, enjeux de coordination, juridicisation puis gestionnarisation de la relation public-privé. Nous mettons en évidence le rôle primordial d’artefacts dans l’encadrement de l’activité des parties prenantes. Ce faisant, nous interrogeons la recomposition des outils, des savoir-faire et des méthodes de l’urbanisme opérationnel d’initiative publique.
Ces épreuves nous renseignent plus largement sur l’évolution des grandeurs valorisées par les professionnels de la fabrique urbaine. Nous mettons en évidence un renforcement de l’activité médiatique et en réseau et une démultiplication des intermédiaires. Ces déplacements questionnent le sens, les ressources et la place conférée à l’expertise dans l’encadrement de la relation entre acteurs publics et privés de la fabrique urbaine.
Mots clés : CIFRE ; Ethnographie ; Assistance à maitrise d’ouvrage ; Grand Paris ; Réinventer Paris ; Appel à projets ; Appel à projets urbains innovants ; Innovation ; Cession foncière ; Partenariat public-privé ; Urbanisme négocié ; Urbaniste.
Soutenance de la thèse le vendredi 6 octobre 2023
Année d’inscription à la thèse : 2018
Ecole doctorale : VTT – Ville, Transports et Territoires
Composition du jury
Véronique Biau – Architecte-Urbaniste de l’État HDR, ENSA Paris-La Villette – LAVUE (rapporteure)
Alain Faure – Directeur de recherche, CNRS – PACTE (rapporteur)
Corinne Delmas – Professeure, Université Gustave Eiffel – LATTS
Laurent Devisme – Professeur, ENSA Nantes – LAAU
Silvère Tribout – Maitre de conférences, Université Rennes 2 – ESO
Guillaume Tiffon – Professeur, Université d’Evry Paris-Saclay – Centre Pierre Naville
Emilie Bajolet – Directrice adjointe conseil et programmation, AREP (membre invitée)
Elsa Vivant – Professeure, Université Gustave Eiffel – LATTS (directrice de thèse)